LE CHEMIN DU SOUVENIR
Maintenant que nous avons montré l’organisation des mémoires, leurs différents rôles et leurs interactions, vous devez vous demander: oui mais comment ? Par quels moyens notre mémoire est-elle capable de se souvenir d’événements survenus des mois voire des années plus tôt ? De quelle nature est la trace laissée par ces évènements dans notre cerveau ? Ces dernières années, les découvertes des scientifiques grâce aux progrès notamment dans le domaine de l’imagerie médicale ont permis de définir les étapes de la mémorisation d’un souvenir dans les mémoires de représentation à long terme. On divise cette mémorisation en quatre grandes étapes :
- l’encodage
- le stockage
- la consolidation
- la récupération
L'encodage
Un souvenir est principalement composé d’images, de sons, de goûts ou encore d’odeurs, tous ces sens sont réceptionnés et traités dans les structures sensorielles du cerveau par des neurones spécifiques. Par exemple, dans le cortex visuel, les différents neurones spécialisés vont analyser l’image reçue, certains sont chargés des couleurs, d’autres des formes… Chaque neurone va convertir ces informations en une multitude d’impulsions électriques, et ensemble les neurones forment ce que l’on appelle un « motif d’activités neuronales », c’est-à-dire, en gardant l‘exemple du cortex visuel, l’image perçue par les yeux. Chaque motif d’activité neuronale est unique et se différencie par sa composition, la localisation des impulsions électrique, et son rythme, la fréquence de ces impulsions électriques. Ce mécanisme a lieu dans chaque aire sensorielle pour chaque sens, et tous les aspects d’un épisode vécu (le son, l’image, le goût, l’odeur et le toucher) sont codés sous la forme de chaines de neurones et d’impulsions électriques. Seulement on ne peut pas encore parler de souvenir, seulement d’un épisode vécu en direct, encodé et composé de motifs d’activité neuronale répartis dans les cortex sensoriels. Pour arriver à stocker un souvenir il va falloir lier ces différentes informations.
Un souvenir est principalement composé d’images, de sons, de goûts ou encore d’odeurs, tous ces sens sont réceptionnés et traités dans les structures sensorielles du cerveau par des neurones spécifiques. Par exemple, dans le cortex visuel, les différents neurones spécialisés vont analyser l’image reçue, certains sont chargés des couleurs, d’autres des formes… Chaque neurone va convertir ces informations en une multitude d’impulsions électriques, et ensemble les neurones forment ce que l’on appelle un « motif d’activités neuronales », c’est-à-dire, en gardant l‘exemple du cortex visuel, l’image perçue par les yeux. Chaque motif d’activité neuronale est unique et se différencie par sa composition, la localisation des impulsions électrique, et son rythme, la fréquence de ces impulsions électriques. Ce mécanisme a lieu dans chaque aire sensorielle pour chaque sens, et tous les aspects d’un épisode vécu (le son, l’image, le goût, l’odeur et le toucher) sont codés sous la forme de chaines de neurones et d’impulsions électriques. Seulement on ne peut pas encore parler de souvenir, seulement d’un épisode vécu en direct, encodé et composé de motifs d’activité neuronale répartis dans les cortex sensoriels. Pour arriver à stocker un souvenir il va falloir lier ces différentes informations.
Le stockage
La structure cérébrale responsable du stockage est l’hippocampe. Située dans le lobe temporal médian, cette structure du système limbique nous sert à mémoriser les souvenirs, sans l’hippocampe il est impossible de mémoriser un souvenir. La découverte du rôle de l’hippocampe dans la mémoire s’est faite dans les années 50, grâce au désormais célèbre patient Henry Molaison, alias « HM », qui souffrait d’une épilepsie résistante aux médicaments, s’est vu enlevé ses deux hippocampe lors d’une opération. Si le problème des crises d’épilepsie a effectivement été en partie résolu, le patient a également été victime de fort problème de mémoire après son opération, il était devenu impossible pour lui de former de nouveau souvenir. Son cas, étudié à l’époque par la neuropsychologue canadienne Brenda Milner, est aujourd’hui bien connu des scientifiques pour avoir mis en évidence le rôle crucial de l’hippocampe dans la formation des souvenirs au quotidien.
La structure cérébrale responsable du stockage est l’hippocampe. Située dans le lobe temporal médian, cette structure du système limbique nous sert à mémoriser les souvenirs, sans l’hippocampe il est impossible de mémoriser un souvenir. La découverte du rôle de l’hippocampe dans la mémoire s’est faite dans les années 50, grâce au désormais célèbre patient Henry Molaison, alias « HM », qui souffrait d’une épilepsie résistante aux médicaments, s’est vu enlevé ses deux hippocampe lors d’une opération. Si le problème des crises d’épilepsie a effectivement été en partie résolu, le patient a également été victime de fort problème de mémoire après son opération, il était devenu impossible pour lui de former de nouveau souvenir. Son cas, étudié à l’époque par la neuropsychologue canadienne Brenda Milner, est aujourd’hui bien connu des scientifiques pour avoir mis en évidence le rôle crucial de l’hippocampe dans la formation des souvenirs au quotidien.
Seulement, le cerveau reçoit une multitude d’informations à chaque minute de notre vie, impossible pour lui de tout retenir, il faut donc faire un tri dans ses informations avant que l’hippocampe ne les stocke à long terme. C’est là que le circuit de Papez rentre en jeu. (Les découvertes qui ont suivies le cas HM ont montré que l’hippocampe faisait partie d’un plus grand circuit, le circuit de Papez)
Le circuit de Papez est un circuit de liaison entre différentes structures du système limbique, il commence dans l’hippocampe et y finit, il passe entre autre par l’amygdale, le fornix, les corps mamillaires, le cortex cingulaire et le thalamus. Certaines de ces structures ont une fonction dans la régulation de l’émotion, le rôle du Circuit de Papez est donc d’associer un contenu émotionnel aux épisodes que nous vivons et de filtrer les souvenirs qui seront conservés dans l’hippocampe, un évènement provoquant une très forte émotion (bonheur, peur…) impliquera une forte activation des structures du circuit de Papez, qui transmettront l’information à l’hippocampe pour insister sur le stockage de cet évènement.
Le circuit de Papez est un circuit de liaison entre différentes structures du système limbique, il commence dans l’hippocampe et y finit, il passe entre autre par l’amygdale, le fornix, les corps mamillaires, le cortex cingulaire et le thalamus. Certaines de ces structures ont une fonction dans la régulation de l’émotion, le rôle du Circuit de Papez est donc d’associer un contenu émotionnel aux épisodes que nous vivons et de filtrer les souvenirs qui seront conservés dans l’hippocampe, un évènement provoquant une très forte émotion (bonheur, peur…) impliquera une forte activation des structures du circuit de Papez, qui transmettront l’information à l’hippocampe pour insister sur le stockage de cet évènement.
A ce stade, toutes les conditions sont réunies pour que l’hippocampe stocke le souvenir. Toutes les informations, encodées dans les cortex sensoriels et associées à une émotion grâce au circuit de Papez, convergent vers l’hippocampe, là elles sont reliées entre elles, comparées et mises en relation avec les informations déjà stockées, puis, une fois traitées par l’hippocampe sont renvoyées dans les aires sensorielles du cortex d’où elles proviennent. L’hippocampe ne stocke donc pas les informations en tant que telles, mais le chemin parcouru depuis leur arrivée dans le cerveau. Il faut donc comprendre que la nature d’un souvenir n’est pas une information passive gravée dans notre cerveau, à la manière d’un livre stocké dans une bibliothèque, mais bien une trace laissée sous la forme d’un circuit de neurones. On appelle ces traces laissées par les souvenirs les traces mnésiques.
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"La nature d'un souvenir n'est pas une information passive gravée dans notre cerveau [...] mais bien une trace laissée sous la forme d’un circuit de neurones."
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La consolidation
Le rôle de l’hippocampe ne s’arrête pas là. En effet, à la suite de l’étape dite de « Stockage », la trace laissée par le souvenir est encore très fragile et en aucun cas destinée à durer dans le temps, c’est alors que commence la phase de « consolidation » du souvenir pour le conserver sur le long terme. Le processus de « consolidation » est également appelé Potentialisation à Long Terme (LTP), il est contrôlé par l’hippocampe et consiste a répéter encore et encore l’activité qui a eu lieu lors de l’encodage et du stockage du souvenir, c’est à dire faire marcher, à haute fréquence, le circuit de neurone qui forme la trace du souvenir. Ce travail de réactivation va principalement se dérouler pendant notre sommeil qui joue un rôle important et actif dans la « consolidation ».
La Potentialisation à Long Terme va cibler un endroit clé du circuit de neurones: les synapses. Une synapse est un point de contact, de communication entre deux neurones, c’est là que le message passe du premier au deuxième neurone, la transmission s’y fait grâce à des neurotransmetteurs. Lorsqu’un message provenant du neurone pré-synaptique (neurone A sur le schema) arrive à la synapse, il entraine la libération, dans la fente synaptique, par les vésicules synaptiques, de neuro-transmetteurs, transportant le message, qui se fixent sur les récepteurs du neurone post-synaptique (neurone B sur le schéma) et lui passent à leur tour le message. Lors de leur fixation sur les récepteurs, les neuro-transmetteurs ne font pas que transmettre le message au neurone post-synaptique, il vont provoquer la formation de molécules AMPc, qui active la protéine kinase A (PKA) qui elle-même va phosphoryler, c’est à dire activer, la protéine CREB, dont le rôle est d’ordonner la formation de nouveaux récepteurs à neurotransmetteurs et de les placer à la surface du neurone. Ces nouveaux récepteurs rendent la synapse plus efficace. Chaque passage de message dans une synapse la rend donc plus efficace, c’est le phénomène utilisé dans la « consolidation », l’hippocampe active les circuits de neurones et donc les synapses à haute fréquence pour les rendre plus efficace et les renforcer. Toutefois, cette première consolidation à l’aide de nouveaux récepteurs est éphémère. En revanche, si la potentialisation à long terme continue, et que l’on continue à stimuler les circuits de neurones, les changements peuvent être plus importants et plus durables. Une stimulation répétée sur le long terme va provoquer l’interaction de la protéine CREB avec le noyau du neurone qui déclenche la croissance de nouvelles synapses entre les deux neurones formant la première synapse. La multiplication des synapses renforce profondément les connexions entre neurones. Grâce à ça, ils réagiront à une nouvelle stimulation même longtemps après.
La « consolidation » ou potentialisation à long terme, grâce au travail de réactivation de l’hippocampe, a rendu le circuit de neurones et donc le souvenir profondément durable. Le travail de l’hippocampe pour arriver à ce résultat s’étale sur de très longues périodes qui peuvent aller jusqu’à trois années après l’apprentissage du souvenir. Après cette période, le souvenir est durable et stable, ses liaisons sont efficaces et résistantes, il n’a plus besoin de l’hippocampe, il va donc progressivement se séparer de l’hippocampe et migrer vers le cortex pré-frontal où il devient autonome. Cette séparation de l’hippocampe et des souvenirs à la fin de la potentialisation à long terme est confirmée par les observations faites sur le patient «HM » que nous avons déjà évoqué auparavant. Pour rappel, ce patient qui s’était vu retirer ses hippocampes pour résoudre son problème de crises d’épilepsie persistantes, s’était retrouvé incapable de former de nouveaux souvenirs après son opération, prouvant ainsi le rôle de l’hippocampe dans le stockage des souvenirs. Une autre observation avait été faite sur ce patient: il était incapable de se rappeler des 3 à 5 années précédant son opération mais n’éprouvait aucun mal à évoquer des souvenirs datant de plus de 3 à 5 ans avant son opération. Cela montre bien que les souvenirs deviennent indépendants de l’hippocampe après la phase de consolidation.
Le rôle de l’hippocampe ne s’arrête pas là. En effet, à la suite de l’étape dite de « Stockage », la trace laissée par le souvenir est encore très fragile et en aucun cas destinée à durer dans le temps, c’est alors que commence la phase de « consolidation » du souvenir pour le conserver sur le long terme. Le processus de « consolidation » est également appelé Potentialisation à Long Terme (LTP), il est contrôlé par l’hippocampe et consiste a répéter encore et encore l’activité qui a eu lieu lors de l’encodage et du stockage du souvenir, c’est à dire faire marcher, à haute fréquence, le circuit de neurone qui forme la trace du souvenir. Ce travail de réactivation va principalement se dérouler pendant notre sommeil qui joue un rôle important et actif dans la « consolidation ».
La Potentialisation à Long Terme va cibler un endroit clé du circuit de neurones: les synapses. Une synapse est un point de contact, de communication entre deux neurones, c’est là que le message passe du premier au deuxième neurone, la transmission s’y fait grâce à des neurotransmetteurs. Lorsqu’un message provenant du neurone pré-synaptique (neurone A sur le schema) arrive à la synapse, il entraine la libération, dans la fente synaptique, par les vésicules synaptiques, de neuro-transmetteurs, transportant le message, qui se fixent sur les récepteurs du neurone post-synaptique (neurone B sur le schéma) et lui passent à leur tour le message. Lors de leur fixation sur les récepteurs, les neuro-transmetteurs ne font pas que transmettre le message au neurone post-synaptique, il vont provoquer la formation de molécules AMPc, qui active la protéine kinase A (PKA) qui elle-même va phosphoryler, c’est à dire activer, la protéine CREB, dont le rôle est d’ordonner la formation de nouveaux récepteurs à neurotransmetteurs et de les placer à la surface du neurone. Ces nouveaux récepteurs rendent la synapse plus efficace. Chaque passage de message dans une synapse la rend donc plus efficace, c’est le phénomène utilisé dans la « consolidation », l’hippocampe active les circuits de neurones et donc les synapses à haute fréquence pour les rendre plus efficace et les renforcer. Toutefois, cette première consolidation à l’aide de nouveaux récepteurs est éphémère. En revanche, si la potentialisation à long terme continue, et que l’on continue à stimuler les circuits de neurones, les changements peuvent être plus importants et plus durables. Une stimulation répétée sur le long terme va provoquer l’interaction de la protéine CREB avec le noyau du neurone qui déclenche la croissance de nouvelles synapses entre les deux neurones formant la première synapse. La multiplication des synapses renforce profondément les connexions entre neurones. Grâce à ça, ils réagiront à une nouvelle stimulation même longtemps après.
La « consolidation » ou potentialisation à long terme, grâce au travail de réactivation de l’hippocampe, a rendu le circuit de neurones et donc le souvenir profondément durable. Le travail de l’hippocampe pour arriver à ce résultat s’étale sur de très longues périodes qui peuvent aller jusqu’à trois années après l’apprentissage du souvenir. Après cette période, le souvenir est durable et stable, ses liaisons sont efficaces et résistantes, il n’a plus besoin de l’hippocampe, il va donc progressivement se séparer de l’hippocampe et migrer vers le cortex pré-frontal où il devient autonome. Cette séparation de l’hippocampe et des souvenirs à la fin de la potentialisation à long terme est confirmée par les observations faites sur le patient «HM » que nous avons déjà évoqué auparavant. Pour rappel, ce patient qui s’était vu retirer ses hippocampes pour résoudre son problème de crises d’épilepsie persistantes, s’était retrouvé incapable de former de nouveaux souvenirs après son opération, prouvant ainsi le rôle de l’hippocampe dans le stockage des souvenirs. Une autre observation avait été faite sur ce patient: il était incapable de se rappeler des 3 à 5 années précédant son opération mais n’éprouvait aucun mal à évoquer des souvenirs datant de plus de 3 à 5 ans avant son opération. Cela montre bien que les souvenirs deviennent indépendants de l’hippocampe après la phase de consolidation.
La récupération
La récupération est la dernière phase du processus de mémorisation, c’est elle qui nous permet de nous remémorer des souvenirs et des connaissances si les trois précédentes étapes ont été correctement effectuées lors de l’apprentissage. Cette remémoration se fait en réactivant la trace mnésique du souvenir, c’est à dire le circuit de neurones. On distingue deux formes de récupération: la reconnaissance (non-volontaire) et le rappel libre (volontaire). Les structures qui jouent un rôle dans la récupération sont l’hippocampe pour les souvenirs récents et le cortex pré-frontal pour les souvenirs plus anciens. Ces deux structures ont accès aux « adresses » des circuits de neurones formant les souvenirs qu’elles ont triés et reliés entre eux lors de l’apprentissage. Lors d’un rappel, volontaire ou non, un mot, une image, un son, provoque la réactivation de la trace laissée par le souvenir associé à ce mot, image, son… Par exemple, si vous regardez une photo de votre anniversaire, l’hippocampe et le cortex pré-frontal vont réactiver les autres traces associées à cette image, ainsi vous vous rappellerez surement de qui était avec vous, de l’endroit où vous étiez, des cadeaux que vous avez reçu, bref de tous les détails correspondants à cette évènement et ayant été gravés à long terme dans votre mémoire.
La récupération est la dernière phase du processus de mémorisation, c’est elle qui nous permet de nous remémorer des souvenirs et des connaissances si les trois précédentes étapes ont été correctement effectuées lors de l’apprentissage. Cette remémoration se fait en réactivant la trace mnésique du souvenir, c’est à dire le circuit de neurones. On distingue deux formes de récupération: la reconnaissance (non-volontaire) et le rappel libre (volontaire). Les structures qui jouent un rôle dans la récupération sont l’hippocampe pour les souvenirs récents et le cortex pré-frontal pour les souvenirs plus anciens. Ces deux structures ont accès aux « adresses » des circuits de neurones formant les souvenirs qu’elles ont triés et reliés entre eux lors de l’apprentissage. Lors d’un rappel, volontaire ou non, un mot, une image, un son, provoque la réactivation de la trace laissée par le souvenir associé à ce mot, image, son… Par exemple, si vous regardez une photo de votre anniversaire, l’hippocampe et le cortex pré-frontal vont réactiver les autres traces associées à cette image, ainsi vous vous rappellerez surement de qui était avec vous, de l’endroit où vous étiez, des cadeaux que vous avez reçu, bref de tous les détails correspondants à cette évènement et ayant été gravés à long terme dans votre mémoire.
Il existe donc cinq mémoires différentes reliées entre elles. Le souvenir dans ces mémoires est stocké sous la forme de circuit neuronaux se formant en suivant un processus de quatre étape. Mais nous avons remarqué que nous ne retenons pas tout ce que nous vivons. La mémoire est donc associée à un phénomène d'oubli. Comment fonctionne m'oubli et à quel moment de la mémorisation agit-il ? Nous répondrons à cette question dans la partie suivante sur l'oubli naturel.